Alfred Einstein disait que vous ne parviendriez pas à résoudre un problème, en vous plaçant du même point de vue que ceux qui ont créé ce problème. Le souci de nos systèmes éducationnels actuels, est qu'ils ne produisent pas des individus qui tenteront un jour, de résoudre le problème ; ils produisent des individus qui sont le problème.
Sans refaire la sociologie de Bourdieu, ou la motivation de Maslow, il faut juste comprendre, enfin, je suppose, que le « grade distinctionnel » constitue chez l'humain une motivation et une ambition. Peu importe ici que ces motivations prennent pour origine l'orgueil, la vanité, le désir narcissique de gratification, le désir de dominer, le consumérisme ostentatoire, de multiplier les conquêtes féminines (si on se place du point de vue du macho) ou masculines, (comme de nos jours, l'égalité des sexes fait supposer les hommes et les femmes, avoir les mêmes prérogatives en termes de mœurs), ou encore, le simple désir de se sentir au-dessus (ou à part) du lot, par désir de liberté ou de sécurité.
Le fait d'avoir un beau grade social confère souvent des privilèges, des prérogatives, un standing, un cadre de vie (habitus) que les autres, « moins gradés », n'ont pas. Cet ensemble de choses pousse généralement les gens à faire des études et à se dépasser. Dépasser le déterminisme d'une naissance plus ou moins bonne avec un combat d'existence.
Prendre l'ascenseur social est souvent synonyme de longues et coûteuses études. La distinction acquise par l'effort des études sera perçue alors comme un juste retour en méritocratie. Une méritocratie essentiellement scolaire, dite, « à la Française ». La France est un de ces pays où d'éventuels mérites autres que scolaires, n'ont qu'une reconnaissance très relative, voire aucune. Un de ces pays où les mérites sont pour l'essentiel scolaires, tout simplement parce que « l'effet scolaire » bénéficie d'une sorte de « publicité » ou une culture « parole d'évangile », qui rend les mérites évaluables et quantifiables, mais selon des critères particuliers. Ici, le diplôme sera la preuve tangible d'une compétence ou d'un savoir-faire, ce qui aura aussi pour effet, en aval, de faciliter la tâche des recruteurs.
Nous donnons à tort, la croyance aux individus que la carrière est le « Graal du bonheur ». Nous avons pris l'habitude de n'envisager le fait de passer des diplômes de la même façon qu'on rempli « une part de contrat » avec la société. Parce qu'on nous dit, depuis nos plus tendres enfances, que le diplôme mène à la carrière, et que cette carrière est supposée être un idéal, une norme conformée de la réussite humaine. Comme si la société avait, via son école, fait la promesse aux enfants et aux étudiants que s'ils passaient des diplômes, ces diplômes seraient comme la légitimité qu'ils auraient d’exiger de la société qu'elle leur donne une carrière.
« Société, j'ai rempli ma part de contrat, j'ai passé un diplôme ! Maintenant, société, c'est à ton tour de remplir ta « part de contrat », tu dois faire de moi un homme heureux ! Tu dois me donner ce que l’on m'a promis, ce qui me permettra de combler mes désirs de gratification, de distinction et de séduction ; tu dois me donner ce qui sera le socle de mon bonheur, tu dois me donner une carrière ! Une carrière qui me procurera le bonheur conformé.
Tu dois me donner la carrière qui m'a été promise quand j'étais enfant et quand j'ai passé mes diplômes. Ce que l'on me promet depuis ma plus tendre enfance. Depuis ma conscience et mon désir de gosse d'être « grand, puissant et admiré » en échange des efforts que j'ai consenti pour passer ce diplôme ! »
Il est donc fait la promesse à des jeunes gens, éblouis depuis leurs plus tendres enfances par la publicité et la puissance de la pacotille matérialiste, que s'ils deviennent des super producteurs de machins super polluants, ils auront pour mérite et en récompense de cela, le droit de devenir des super-consommateurs de plein de machins super polluants.
Lorsque j'étais enfant, je me posais beaucoup de questions qui restaient sans réponse. J'observais perplexe, les gens courir, se chamailler dans des compétitions scolaires et professionnelles. Le jour où j'ai compris les rouages du monde, j'ai aussi compris que les gens n'allaient pas à l'école pour passer des diplômes dans la noble idée d'améliorer le monde, mais simplement pour sauver leur peau dans un monde de fous. Si en plus, vous parvenez à leur faire croire que s'ils sont égoïstes et qu'ils ne se posent pas de questions sur les conséquences de leurs actes, une « main invisible » sauvera le monde et pardonnera leurs pêchés, alors là, vous obtenez la recette de tout le contraire.
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